Le phénomène identitaire
L’identité excessive me contrarie.
« Le vainqueur d’une compétition olympique s’enveloppe dans le drapeau
national de son pays avant d’effectuer un tour d’honneur ; d'autres se signent
ou prient dans la direction de La Mecque.»
Étonnant !
" Le détroit de Messine est bloqué par les supporters d’un club de Football.
Et
voilà la Sicile isolée du continent italien, en cause une affaire de corruption."
Surprenant !
Chacun possède une identité.
La société nous identifie dès la naissance : un numéro de registre
national, un nom, un prénom.
Tout est prêt pour la mémorisation de nos faits et gestes, la clé unique – en langage informatique - est prête.
Au delà de l’administratif, nous sommes surtout unique par nos caractéristiques
physiques, morales, par notre comportement.
Nous ne sommes identiques à aucune autre personne,
là est notre identité.
Et pourtant, nous éprouvons tous le besoin de
nous réunir derrière quelque chose, quelqu'un pour marquer notre appartenance à un
groupe. Le besoin d’être ensemble, pour écarter
la peur de la solitude.
Une dualité existe donc entre notre besoin d’affirmer notre personnalité et
notre besoin d’appartenir, avec d’autres, à un groupe d’individus avec lesquels
nous partagerons.
Par cette adhésion à un groupe, nous perdrons une part de notre indépendance,
de notre liberté. Nous confions à d’autres le soin de diriger le groupe, de
décider. Quel risque !
Nous identifions, et les autres nous identifient :
- d’abord, sur base de caractéristiques physiques : la couleur de la peau, la beauté physique, le sexe ;
- ensuite, la langue ;
- dès que la contact est établi, il nous importe de connaître ce que l’autre fait dans la vie, quel est son niveau d’études, d’où vient-il, de quelle famille ? C’est la différenciation
sur base de la classe sociale.
Ce n’est qu’après, bien après, qu’on s’intéresse à la personne : sa manière
de penser, sa manière de se comporter.
Notre système d’identification est souvent réducteur !
Nous évoluons dans un environnement conflictuel basé sur des rapports de force
–
tantôt
l’argent, la parole, ou la force physique. Il est donc normal de chercher la
protection du groupe, l’appartenance à un ensemble d’hommes parmi lesquels
on trouvera un guide, un défenseur, ou tout simplement un autre individu capable
lui d’affronter l’autre, l’autre groupe.
L’identification excessive à un groupe est dangereuse,
elle peut se
transformer en fanatisme, un état dans lequel une personne perd son sens critique,
sa raison.
Mais, le fanatisme pour le foot, ce n’est encore rien.
Il existe des identifications bien plus meurtrières : la langue, la
religion, la patrie. On se retrouve devant des dangers de conflits qui
concerneront des millions de personnes.
Les appartenances exclusives ( un
dieu, un parti, ... ) sont les plus dangereuses,
elles permettent de classifier les personnes de manière simpliste, avant
de les faire se dresser les unes contre les autres.
Et pourtant ces éléments d’identification de base que sont la
langue, la religion, la nation sont éphémères au niveau de l’humanité. Les
générations, qui nous
ont précédés, ont pratiqué d’autres religions, ont parlé d’autres langues,
ont salué d’autres
drapeaux – alors que pourtant elles ont vécu sous le même soleil, dans le
même
environnement naturel que nous. Leur bonheur en a-t-il été différent
?
A chaque homme, une identification, NON un homme n’est pas simplement
musulman, ou communiste ou américain.
L’identité d’une personne est la résultante de toutes les influences. L’identité est évolutive
au fil de la vie.
Les éléments d’identité sont par essence infinis.
Et s’il ne devait y avoir qu’une identité principale ce devrait être
l’appartenance à la
communauté des hommes.
Quelques phrases, extraites du roman ‘Les identités meurtrières, d’AMIN MAALOUF,
prix Goncourt de littérature, chantre de la tolérance, de la générosité et
de la sagesse :
- l’humanité entière n’est faite que de cas particuliers, la vie est créatrice
de différences ;
- la sagesse est un chemin de crête, la voie étroite entre deux précipices,
entre deux conceptions extrêmes ;
- pour l’homme, le destin est comme le vent pour un voilier. Celui qui
est à la barre ne peut décider d’où souffle
le vent, ni avec quelle force, mais il peut orienter sa propre voile.